Je ne me souviens de rien, avant ce jour là…
Le contraste des bâtiments ornés d’or et de la Malebrèche.
L’odeur de ces monstres putrides, sans âme.
Mes frères et sœurs, brisés par le chagrin, rebaptisés Sin’dorei.
Et Kael…
Certains l’appelaient notre dernier espoir, d’autres le traitaient de fou.
Qui croire ?
C’est ce jour là que j’ai abandonné mon peuple, ceux qui connaissaient mon passé, mon histoire, ma famille.
Quand ils ont décidé de suivre Kael en Outreterre, pour rejoindre Illidan…
Je n’ai pas eu la force.
La force d’espérer encore.
La force de laisser là, l’amoncèlement de corps sans vie.
Je me suis tapie, sans bruit, tandis que les autres préparaient leur voyage.
Abasourdie, bête, adossée à un arbre.
Le soleil, Belore… me caressait la peau.
Comme dans un rêve, un mauvais rêve.
La nuit est tombée, le bruit s’est estompé.
J’étais seule.
Je le savais, j’attendais simplement mon tour, ma mort.
Une goule, un squelette, ou simplement mes blessures, la faim ou la fatigue.
C’est alors que je les ai aperçu.
Deux petites lumières, brillantes, envoutantes, me fixant dans la pénombre.
Pas un bruit… Elles se rapprochaient de moi.
A peine le crissement délicat des feuilles mortes.
Elles étaient là.
A quelques mètres de moi, je le vis, majestueux félin, qui, de toute sa grâce, m’avait prise pour cible.
Il devait être aussi affamé que moi, désespéré, pour s’approcher aussi près de la Malebrèche.
Pour moi.
Après tout, quitte à mourir, je préfèrais mourir pour lui que pour le fléau, la mort serait certainement douce et rapide, cernée par ses pattes de velours, puissantes et agiles.
Il bondit.
Je fermais les yeux, un reflex.
Il ne se passa rien.
Surprise, je me retournais, il venait de réduire en charpie une créature immonde qui s’apprêtait à m’attaquer.
Je ne savais que faire, comment réagir.
La bête me regardait, mince, d’or et d’ambre comme tout ce qui était beau ici.
La lune se reflétait sur son pelage soyeux.
Je fouillais dans mon sac, à la recherche des quelques vivres qu’ils me restaient et les jetaient à ses pattes.
En remerciement.
Le félin dévorait, tandis que je restais à quelques pas de lui, immobile.
Quand il eu finit, il ne s’enfuit pas.
Il se coucha contre moi, sa chaleur… C’est cette chaleur qui m’a sauvé.
Nous ne nous sommes plus quittés depuis cette nuit.
Nous avons appris à chasser ensemble, à se protéger mutuellement, à s’aimer.
Pourquoi m’a-t-il sauvé ce jour là ?
Pourquoi ne m’a-t-il pas simplement dévorée ?
Encore aujourd'hui je ne saurais le dire.
Mais cela lui à valu le nom de Belore, car dès lors, il est mon soleil.